Surpris par la qualité des films qui concourront cette année lors de la 88ème cérémonie des Oscars, j’ai eu envie de passer en revue avec vous les œuvres nommées dans les quatre catégories principales : meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur et meilleure actrice.


The Revenant : 12 nominations dont meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur

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The Revenant, d’Alejandro González Iñárritu, avec Leonardo DiCaprio, Tom Hardy

Pitch : Un trappeur essaie de survivre après avoir été mutilé par un ours et abandonné par ses compagnons en plein hiver dans les forêts du Dakota. Glagla !

Commentaire : Qu’écrire encore sur ce fameux Revenant ? Jeremiah Johnson trash qui s’ouvre par une impressionnante attaque de peaux-rouges. S’ensuit une scène de combat contre un ours qui est déjà entrée dans l’histoire du cinéma. L’ensemble étant porté par un bon Leonardo DiCaprio tout gercé et ensanglanté. The Revenant en fout plein la vue grâce aux plans-séquences qui nous immergent au cœur de l’action et à l’extraordinaire photo d’Emmanuel Lubezki (Sleepy Hollow, Tree of Life, Gravity). Iñarritu est bien l’un des cinéastes majeurs de ce début de siècle. Virtuose !


 Spotlight : 6 nominations dont meilleur film et meilleur réalisateur

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Spotlight, de Thomas McCarthy, avec Mark Ruffalo, Michael Keaton, Rachel McAdams

Pitch : Des journalistes du Boston Globe enquêtent sur des suspicions d’abus sexuels au sein de l’Église

Commentaire : Dans la tradition des grands films sur les médias. Non pas ceux qui dénoncent leur fonctionnement mais plutôt ceux qui encensent leur mission (Les Hommes du Président, bien sûr, mais aussi la série britannique State of Play). Avec des reporters qui enfilent leur veste et sortent de la rédac en courant, à la recherche du prochain scoop. Un genre très efficace car l’enquête journalistique n’est pas très éloignée de l’enquête policière, mais plutôt que d’être menée par des gros musclés avec des flingues, elle l’est par des petits astucieux avec des stylos. Bref, le genre de film qui redonne foi en le métier de journaliste, avec un rédac chef qui résiste aux pressions et qui laissent ses reporters prendre leur temps.


 Room : 4 nominations dont meilleur film, meilleur réalisateur et meilleure actrice

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Room, de Lenny Abrahamson, avec Brie Larson, Jacob Tremblay, Joan Allen

Pitch : Ma et son fils Jack vivent dans une chambre dans laquelle ils sont prisonniers d’un mystérieux individu qu’ils nomment Old Nick.

Commentaire : Une première partie vraiment fascinante, avec une exploitation originale d’un thème cent fois rabâchés au cinéma : la séquestration. Mais en s’intéressant au quotidien des kidnappés plutôt qu’à l’enquête, Lenny Abrahamson nous donne l’impression de découvrir cette situation pour la première fois. La seconde partie est moins forte mais reste intéressante car elle s’attarde sur ce qui se passe quand la plupart des films de séquestration se terminent. Avec la brillante Brie Larson (Short Term 12).


The Big Short : 5 nominations dont meilleur film et meilleure réalisation

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The Big Short, d’Adam McKay, avec Christian Bale, Steve Carell, Ryan Gosling et Brad Pitt

Pitch : Prédisant l’éclatement de la bulle immobilière et la crise financière qui en suivra, une brochette de traders, gestionnaires de fonds spéculatifs et jeunes investisseurs tentent d’en tirer profit en pariant contre les banques.

Commentaire : Si vous vous dites « Cool, je vais enfin comprendre l’origine de la crise des subprimes grâce à un film qui va me passer tout ça à la machine à simplifier hollywoodienne », détrompez-vous ! À vouloir rendre la crise attractive par le biais d’un récit mené tambour battant et d’une multitude de points de vue, le propos en devient d’une complexité folle. Cependant, cette narration proche du thriller et la galerie d’acteurs délicieusement dingos (surtout Steve Carrel et Christian Bale, ce dernier étant d’ailleurs nommé à l’Oscar du meilleur second rôle) font de The Big Short un film passionnant. On n’en attendait pas moins d’Adam McKay, le réalisateur attitré de Will Ferrell (Anchorman, Talladega Nights). Bref, on ne comprend pas grand-chose mais on ne s’ennuie pas un seul instant.


 Brooklyn : 3 nominations – meilleur film, meilleure actrice, meilleur scénario adapté

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Brooklyn, de John Crowley, avec Saoirse Ronan, Emory Cohen, Domhnall Gleeson, Eve Macklin, Emily Bett Rickards

Pitch : 1952, Eilis est une jeune Irlandaise qui émigre à New York. Contre toute attente, ça se passe plutôt bien pour elle. Elle décroche un job, sort avec un petit Italien bien sympa, sa logeuse la chouchoute, et elle suit même des études en cours du soir. Le rêve américain… Jusqu’au décès de sa sœur qui l’oblige à rentrer dans sa petite ville d’Enniscorthy. L’Irlande lui semble soudain beaucoup plus hospitalière que lorsqu’elle l’a quittée. Dès lors, elle se retrouve tiraillée entre deux pays, entre deux vies.

Commentaire : Trop classique pour servir à sa juste valeur le scénario de Nick Hornby, Brooklyn intéresse mais n’emporte pas. En fait, le film prend tout son intérêt dans sa dernière demi-heure, lorsque s’installe le véritable conflit de l’héroïne : retourner en Amérique ou rester près des siens en Irlande. Mais la mise en scène manque un peu d’audace. On croit qu’on va être dérangé, que ses colocataires vont lui faire des coups de putes, qu’elle va se faire virer, que ça va aller au clash avec son mec et en fait, rien de tout cela n’arrive. Sans pour autant atteindre le niveau de cruauté de Tess ou de Dogville, Brooklyn aurait tout de même pu être un rien plus corrosif. Le film n’est donc pas déplaisant à regarder, or on aurait sans doute préféré qu’il provoque l’effet inverse.


Steve Jobs : 2 nominations dont meilleur acteur

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Steve Jobs, de Danny Boyle, avec Michael Fassbender, Kate Winslet, Seth Rogen, Jeff Daniels

Pitch : Trois moments de la vie de Steve Jobs, à chaque fois quelques minutes avant l’une de ses fameuses présentations de produit. La personnalité complexe du bonhomme se dessine au travers de ses conversations avec son assistante, sa fille, son ancien associé et son boss.

Commentaire : Il aurait sans doute mérité de concourir dans la catégorie Meilleur Réalisateur car c’est, de fait, l’un des meilleurs films du souvent insupportable Danny Boyle (127 heures, Trance, …). Le parti pris de filmer les trois époques sur trois supports différents (16mm, 35mm et digital) est une merveilleuse façon d’évoquer bien sûr le temps qui passe mais surtout l’évolution du personnage. Quant au scénario d’Aaron Sorkin, pourtant artificiel et théâtral, il est terriblement accrocheur. Le film fait d’ailleurs penser à un opéra, non seulement car une des trois scènes se passe à l’opéra de San Francisco, mais aussi pour ses montées musicales, ses allées et venues, et la répétition des situations. Un angle d’attaque cent fois plus intéressant qu’un biopic classique dans lequel on repasserait la vie de Steve Jobs au pas de course. En outre, le film n’est pas tendre avec le cofondateur d’Apple, Michael Fassbender campant un Steve Jobs carrément antipathique.


Carol : 6 nominations dont meilleure actrice

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Carol, de Todd Haynes, avec Cate Blanchett, Rooney Mara, Sarah Paulson

Pitch : La rencontre, dans le New York des années 1950, entre Therese, vendeuse dans une galerie commerçante, et Carol, grande bourgeoise en quête d’émancipation identitaire. La passion naissante entre les deux femmes se voit contrariée par les conventions de l’époque.

Commentaire : Pourquoi n’est-il pas en lice pour l’Oscar du meilleur film ? Il surpasse de loin plusieurs des films briguant la récompense suprême. Emmené par une petite Rooney Mara à croquer avec son bonnet aux couleurs de la Belgique et une Cate Blanchet d’une grande classe, Carol brille par la subtilité de la mise en scène, l’élégance de la photo, la beauté des costumes et des coiffures. Comme Ang Lee l’avait fait avec Brokeback Montain, Todd Haynes pose lui aussi la question du choix : lorsque la société n’est pas prête, que faire, courber l’échine ou s’assumer ? Une merveille !


45 Years: 1 nomination – meilleure actrice

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45 Years, d’Andrew Haigh, avec Charlotte Rampling, Tom Courtenay

Pitch : Un gentil couple d’anglais va célébrer ses 45 ans de mariage. Mais une semaine avant la grande fête, le mari apprend que le corps de son amour de jeunesse, disparue dans les montagnes suisses en 1962, vient d’être retrouvé. Marqué par la nouvelle, son comportement change et le doute semble s’installer petit à petit.

Commentaire : J’admire le naturalisme de ce film. Alors que je reprochais à Brooklyn de manquer de cruauté, j’apprécie ici qu’Andrew Haigh ne se prenne pas pour Haneke. Une belle réflexion sur l’amour, sur le fait d’aimer deux personnes à la fois, sur le doute et la jalousie.


 Trumbo : 1 nomination – meilleur acteur

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Trumbo, de Jay Roach, avec Bryan Cranston, Diane Lane, Helen Mirren

Pitch : Dalton Tumbo, l’un des scénaristes les plus célèbres d’Hollywood dans les années 1940, a passé 15 années sur la liste noire car il était membre du parti communiste. Banni des studios, le malicieux Dalton trouvera nombre de stratagèmes pour continuer à travailler.

Commentaire : Trumbo fait partie de cette catégorie de film qui, comme Brooklyn, ont d’autres qualités que leur réalisation. On a l’impression de regarder un bon docufiction retraçant une période passionnante de l’histoire d’Hollywood. On s’amuse aussi de croiser les personnages de John Wayne en président de la Motion Picture Alliance for the Preservation of American Ideals, Kirk Douglas en producteur/acteur de Spartacus et Otto Preminger passant Noël avec la famille Trumbo afin de mieux superviser l’écriture d’Exodus. Porté par des acteurs truculents (Bryan Cranston (Breaking Bad), John Goodman), le film est réellement plaisant.


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Mad Max: Fury Road, de George Miller

Mad Max: Fury Road, de George Miller, Bridge of Spies, de Steven Spielberg et The Martian, de Ridley Scott, sont des qualtity action movies emmenés par des têtes d’affiches en grande forme (Charlize Theron, Tom Hanks, Matt Damon) et soutenus par une réalisation cartoonesque souvent hilarante signée par des vétérans qui en ont encore sous la semelle.

À noter que je n’ai pas encore vu The Danish Girl et Joy.