George Romero vient de rejoindre le monde des morts. De façon définitive cette fois. Il laisse derrière lui une célèbre saga de six films de zombies, parmi lesquels les cultes La Nuit des Morts-Vivants et Zombie, mais aussi une petite perle méconnue : Diary of the Dead (2008).
George A. Romero avait su capter l’air du temps. Fin des années 2000, Youtube est en pleine explosion, les blogs prolifèrent, les smartphones ont envahi la planète et plus ou moins tout le monde en Occident est en possession d’un appareil capable de filmer. Dès lors la sensation de réalisme au cinéma ne passe définitivement plus par une image léchée et parfaitement éclairée mais bien par le grain, le flou et le décadrage. Ce nouveau rapport aux images relance la mode du found footage, ces films qui semblent montés à partir d’enregistrements réels. Dix ans après The Blair Witch Project, mais avant le développement de franchises cyniques à la Paranormal Activity, de jeunes cinéastes comme Jaume Balagueró et Paco Plaza (REC) ou Matt Reeves (Cloverfield), mais des vétérans tels Brian De Palma (Redacted) ou George Romero avec Diary of the Dead, s’engouffrent dans la brèche.
Ce nouveau réflexe acquit en à peine une demi-décennie par le genre humain, à savoir sortir sa caméra à tout bout de champ dans une volonté de marquer sa présence historique et géographique, justifie désormais le fait de continuer à filmer malgré un danger de plus en plus imminent. Alors qu’à l’époque on avait envie de crier au caméramam de Cannibal Holocaust : « Lâche ta caméra et barre-toi ! », on accepte aujourd’hui qu’une bande de gogos préfèrent s’attarder, iPhone au point, devant un monstre géant en train de détruire New York plutôt que de prendre la poudre d’escampette.
Avec Diary of the Dead, l’ami George propose de croiser ce concept du found footage avec un autre, mille fois exploité au cinéma, celui du film dans le film. Ce cinquième opus de la saga des morts-vivants s’ouvre donc sur un tournage. Des étudiants en cinéma sont en train de réaliser un film d’horreur lorsqu’ils sont amenés à prendre la fuite et à errer sur les routes des États-Unis dans l’espoir d’échapper au fléau. Ils ne s’arrêteront plus de filmer, documentant leur road trip mortel et agrémentant leur production d’images d’Internet et des caméras de surveillance.
Cette approche par le biais du méta film permet à Romero quelques scènes de bravoure, notamment lorsque le cameraman, à court de batterie et obligé de se brancher sur secteur, se retrouve bloqué dans une pièce alors qu’il entend des cris dans le couloir. Impossible de savoir ce qui se passe car le fil de la prise n’est pas assez long !
C’est aussi l’occasion pour le père du film de zombies de régler délicieusement ses comptes avec ses héritiers artistiques. Au début du film, Jason, l’étudiant réal, enguirlande l’acteur qui interprète un mort-vivant (en l’occurrence une momie) poursuivant une jeune fille dans la forêt. Motif de son courroux : il court. Or, un zombie ça ne court pas. « Tu es un cadavre, putain. À cette vitesse, tes chevilles vont casser. » « Comment je vais l’attraper si je ne cours pas ? » répond la momie. « Contente-toi d’agripper sa robe… »
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